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Chroniques d'une factrice
3 avril 2007

Le papier des pauvres

Par Bérangère
   
 
  Petite Jeanne, comme certains se plaisaient à la surnommer, habitait là où elle s'inventait des amours, ou n'habitait pas... C'est au bord d'une rivière que personne ne connaissait, sauf un très très vieux pêcheur chinois, qui peut-être n'existait plus, qu'elle avait choisi de commencer la construction de sa montgolfière-cathédrale. La clairière était belle et spacieuse, on aurait dit des écritures d'encyclopédie.
    Elle n'avait jamais amener un amant en cet endroit. Elle le réservait pour son homme idéal. Cette nuit, Jeanna était venue, pédalant à son habitude comme une gaillarde paysanne. Elle tenait serrée contre elle un petit paquet de papier brun. Quand elle fut arrivée, elle sauta lestement du vélo, telle une gymnaste roumaine de 14 ans. Elle alla s'asseoir à côté de ses premières pierres et les contempla longuement, la larme à l'œil. Ensuite, délicatement, elle sortit de l'enveloppe brune, une vingtaine de lettres qu'elle brûla une à une.
    Elle divulguait un sourire à faire fendre l'âme d'un pendu au fur et à mesure du déroulement de sa tâche. Jeanna n'avait jamais aimé les factures, ça avait commencé toute petite. Cependant, elle affectionnait particulièrement leurs exhalaisons quand elles brûlaient, ça sentait une odeur si particulière qu'elle aurait pu la retrouver n'importe-où. C'était acre, avec des relents de papier d'Arménie, ça sentait le papier d'occasion, le papier pour pauvres, et ça, ça énervait Jeanna. Elle n'avait jamais vu des factures sur papier glacé, ça ne devait exister qu'à Neuilly, pensait-elle. Invariablement, ces pensées la ramenait au bel Olivier, le facteur-sachem, un bout de son homme
e idéal qu'il lui faudrait aller quérir un jour...

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